Les temps forts de la semaine dernière
- Le président Trump a annoncé l’instauration de droits de douane élevés visant plusieurs alliés clés, notamment le Canada, la Suisse, Taïwan et l’Inde. Cette décision a ravivé les tensions commerciales mondiales et déclenché une vague de volatilité sur les marchés.
- Au-delà des tensions commerciales, les données américaines publiées récemment font état d’une situation macro-économique plus fragile. Les créations d’emplois non agricole se sont limitées à + 73 000, avec de fortes révisions à la baisse par rapport aux mois précédents, tandis que le taux de chômage est remonté à 4,2 %. Les chiffres définitifs de l’ISM ont également déçu, renforçant les craintes d’un ralentissement économique plus général.
- Si Jerome Powell a réaffirmé son approche attentiste, les récentes données mitigées sur l’emploi ainsi que l’indice ISM ont accru la probabilité d’une baisse des taux, renforçant les anticipations d’un assouplissement monétaire.
- Microsoft et Meta ont dépassé les attentes, tandis qu’Apple a enregistré la croissance la plus rapide de son chiffre d’affaires depuis 2021, même si celle-ci est en grande partie due à la constitution de stocks avant l’entrée en vigueur des droits de douane. À l’inverse, les résultats d’Amazon n’ont pas été à la hauteur, ce qui met en évidence une divergence notable dans les performances des géants de la technologie.
Et ensuite ?
- Aux États-Unis, plusieurs statistiques clés seront publiées notamment les commandes d’usines, l’indice ISM des services, la balance commerciale, ainsi que la productivité au deuxième trimestre et le coût de la main-d’œuvre ; le tout dans l’ombre des nouveaux tarifs douaniers qui entreront en vigueur le 7 août.
- En Europe, la Banque d’Angleterre devrait à nouveau réduire ses taux, alors que l’Allemagne, la France et la zone euro publieront leurs données sur la production industrielle, les commandes d’usines et les ventes au détail, ce qui donnera un nouvel aperçu du niveau de la croissance de la région.
- En Asie, les chiffres du commerce extérieur chinois pour juillet devraient révéler un affaiblissement des exportations, tandis que les chiffres des salaires au Japon et le compte rendu de la BoJ pourraient fournir des indices sur l’orientation de la politique monètaire, alors que le yen est sous pression.
- La saison des résultats se poursuit avec les rapports d’Eli Lilly, de Berkshire Hathaway, d’AMD, de Siemens et de Toyota. Les investisseurs se concentreront sur les orientations futures dans un contexte d’incertitude sur les tarifs douaniers et de difficultés macroéconomiques, en particulier dans le secteur pharmaceutique.
Nos convictions
Scénario de base
- États-Unis : La dynamique de croissance s’essouffle, alors que la demande intérieure et le marché du travail montrent des signes de tension, laissant présager un ralentissement de la croissance au second semestre 2025. Bien que l’inflation reste supérieure aux objectifs, elle ralentit progressivement. La mise en œuvre du programme économique de l’administration Trump est ternie par l’incertitude politique, notamment en matière de droits de douane et de redistribution, ce qui envoie des signaux contradictoires aux marchés et complique la réponse de la Fed en matière de politique monétaire. Le marché de l’emploi, qui constitue un élément clé du double mandat de la Fed, étant désormais menacé, la probabilité d’un cycle accéléré de baisse des taux s’en trouve renforcée.
- Zone euro : La zone euro a affiché une croissance timide, et le nouvel accord commercial entre les États-Unis et l’Union européenne augmente la pression. Les droits de douane de 15 % sur la plupart des exportations de l’Union européenne à compter du 1eraoût évitent certes des mesures plus sévères, mais ils pèsent sur la compétitivité. L’Union européenne s’est également engagée sur des achats conséquents d'énergie et de matériel de défense aux États-Unis, même si certains objectifs semblent irréalistes. Si cet accord réduit l’incertitude et pourrait soutenir le moral des investisseurs, son impact net devrait être désinflationniste et pourrait peser sur le PIB d’ici 2026.
- Chine : La croissance économique reste atone mais relativement stable. Les pressions déflationnistes persistantes et la faiblesse de la demande intérieure continuent de peser sur le moral des acteurs économiques. Les négociations avec les États-Unis en vue d’un accord commercial sont toujours en cours, tandis que des faiblesses structurelles, telles que la surcapacité industrielle et les déséquilibres sur le marché immobilier, persistent. La poursuite du soutien politique, sous la forme de mesures monétaires et budgétaires, devrait contribuer à éviter un ralentissement plus marqué.
- La croissance mondiale ralentit progressivement et les divergences régionales s’accentuent. Les trajectoires inflationnistes varient considérablement : déflation persistante en Chine, inflation modérée en Europe et inflation en légère baisse mais tenace aux États-Unis.
Notre analyse de l’accord commercial entre les États-Unis et l’Union européenne
L’Union européenne et les États-Unis ont conclu un accord commercial qui prévoit l’instauration de droits de douane de 15 % sur la plupart des exportations de l’Union européenne vers les États-Unis à compter du 1er août, évitant ainsi la menace de droits de douane supérieurs à 30 %. Il est important de noter que les droits de douane sur les automobiles passeront de 27,5 % à 15 %, ce qui profitera à l’Allemagne et à l’Italie, tandis que les produits pharmaceutiques resteront à 0 % jusqu’à la conclusion de l’enquête en cours au titre de l’article 232, avec un plafond potentiel de 15 % à partir de 2027. Certains secteurs, tels que l’aviation, les semi-conducteurs, certains produits chimiques et les matières premières, seront exemptés dans le cadre d’un dispositif douanier « zéro pour zéro ». Cependant, les droits de douane sur l’acier et l’aluminium resteront à 50 % pour l’instant, bien que des exemptions soient envisageables via des quotas spécifiques à négocier ultérieurement.
Par ailleurs, l’UE s’est engagée, sur les trois prochaines années, à importer pour 750 milliards de dollars d’énergie et de puces d’intelligence artificielle, pour 600 milliards de dollars d’investissements privés, ainsi que d’acheter pour des « centaines de milliards » d’équipements militaires américains. Bien que ces chiffres paraissent considérables, la plupart reflètent les tendances existantes en matière d’investissement ; l’objectif concernant l’énergie risque toutefois d’être difficile (voire impossible) à atteindre.
En fin de compte, si l’impact sur l’économie européenne sera notable, nous pensons que l’accord réduit l’incertitude commerciale et pourrait stimuler le climat des affaires en Europe à court terme. Avec des droits de douane effectifs à environ 15 %, nous pensons qu’ils pourraient peser sur le PIB de l’UE à hauteur de -0,6 % d’ici 2026 et avoir des conséquences désinflationnistes dans un avenir proche. Après la récente décision de la BCE sur les taux d’intérêt et les commentaires optimistes de C. Lagarde lors de la conférence de presse qui a suivi, la BCE pourrait attendre de voir des signes clairs du ralentissement de la croissance avant de réduire à nouveau ses taux.
Cet accord pourrait également affecter l’économie américaine. Sans revenir aux niveaux du 2 avril, les récents accords commerciaux indiquent clairement une augmentation significative du taux moyen des droits de douane effectifs sur les importations aux États-Unis. Les prix à la consommation devraient finir par augmenter, ce qui pèsera sur la consommation et donc sur la croissance. Par conséquent, il est probable que la Fed reporte toute baisse de ses taux jusqu’à ce que les effets inflationnistes des accords commerciaux actuels soient plus clairs.
Risques
- Politique commerciale et budgétaire américaine: Le programme budgétaire et commercial en constante évolution de l’administration Trump génère une volatilité ciblée, en particulier dans les secteurs pharmaceutique et des métaux de base (comme le cuivre). Certains pays, comme la Suisse et le Canada, sont également confrontés à l’imposition de droits de douane élevés et ciblés, ce qui crée de nouveaux défis pour les exportateurs. Au final, les droits de douane devraient entraîner une hausse des prix et peser sur la consommation.
Strategie cross asset et positionnement du portefeuille
- Le soulagement initial suscité par l’accord commercial entre les États-Unis et l’Union européenne s’est vite estompé. La publication de données américaines décevantes (ISM, emploi), combinée à une nouvelle vague de droits de douane généralisés, visant des alliés proches et d’autres pays, a ravivé les inquiétudes sur le commerce mondiale et la volatilité des marchés.
- Actions mondiales :
- Notre positionnement demeure globalement neutre, sans préférence régionale significative malgré les récentes évolutions.
- Allocation régionale :
- Les accords commerciaux conclus avec l’UE et le Japon ont apporté davantage de clarté, même si leur impact économique complet mettra du temps à se concrétiser. Au Japon, la visibilité s’est améliorée, en particulier dans des secteurs tels que l’automobile, à la suite de l’accord tarifaire entre les États-Unis et le Japon. Cet accord et les éventuelles mesures de relance budgétaire qui pourraient être prises dans le cadre une nouvelle direction politique constituent des facteurs favorables. Nous maintenons notre position dans le Topix.
- En Europe, l’accord commercial offre également un cadre plus prévisible, mais son impact économique demeure incertain et devra être confirmé par les données à venir.
- Aux États-Unis, les résultats des entreprises, en particulier ceux des mégacapitalisations technologiques, ont été solides, mais les indicateurs macroéconomiques récents montrent des signes d’affaiblissement, il faudra donc suivre la situation de près.
- Allocation factorielle et sectorielle :
- Tandis que les tensions commerciales menacent la pharmacie et les semi-conducteurs, nous privilégions les thèmes résilients : technologie, IA, industrie européenne et moyennes capitalisations allemandes.
- Emprunts d'État :
- Nous sommes plutôt positifs à l’égard de la duration en Europe, le soutien de la BCE et les mesures de relance contribuant à stabiliser les rendements.
- Nous sommes neutres sur les bons du Trésor américain en raison des incertitudes considérables qui pèsent sur l’inflation et la croissance aux États-Unis. L’impact des droits de douane ajoute à la complexité.
- Crédit :
- En matière de crédit, nous ciblons les titres investment grade – notamment en Europe – pour leurs fondamentaux solides, tout en restant prudents sur le haut rendement compte tenu du resserrement des spreads.
- La dette émergente bénéficie de rendements réels positifs.
- Les stratégies alternatives jouent un rôle de diversification crucial :
- L'or reste surpondéré en tant que couverture stratégique contre les risques géopolitiques et la volatilité des taux réels. La demande est soutenue par les achats des banques centrales et des investisseurs particuliers.
- Nous maintenons une allocation aux actifs alternatifs pour renforcer la stabilité et la diversification du portefeuille hors des classes d’actifs traditionnelles.
- Les taux de change resteront incontournables dans les négociations commerciales et la dynamique générale des marchés :
- Nous restons constructifs sur les devises défensives, même si nous avons récemment pris quelques bénéfices sur notre exposition au yen. En revanche, le dollar devrait rester faible dans un contexte de ralentissement de la croissance mondiale.
Notre positionnement
L’optimisme initial suscité par l’accord commercial entre les États-Unis et l’Union européenne a contribué à apaiser temporairement la volatilité, mais il a été de courte durée. Certes les entreprises américaines ont publié des résultats solides, mais les données révèlent une période de turbulences et un affaiblissement économique. En outre, l’annonce par la Maison Blanche de nouveaux droits de douane à grande échelle visant notamment le Canada et le Brésil a ravivé les inquiétudes sur le commerce mondial et pesé sur les actifs à risque. Dans ce contexte, nous maintenons notre position neutre sur les actions, avec des couvertures prudentes sur les marchés américains et européens, tout en continuant à privilégier les thèmes résilients tels que la technologie et l’IA, l’industrie européenne et les mid caps allemandes. Sur les marchés obligataires, nous restons positifs à l’égard de la duration européenne et neutres sur les bons du Trésor américain. En outre, nous préférons le crédit investment grade européen au haut rendement, avec une exposition sélective à la dette émergente.