En octobre, l’analyse de la configuration du marché nous a rendus plus confiants. Ce mois-ci, les fondamentaux tendent à confirmer cet optimisme. Néanmoins, les incertitudes entourant les perspectives de l’économie mondiale demeurent élevées et le risque d’une baisse des bénéfices reste synonyme de volatilité dans toutes les classes d'actifs. Dans ce contexte, nous avons décidé de maintenir notre surpondération tactique des actions via les marchés américains et émergents, ainsi que notre préférence pour le crédit par rapport aux emprunts d'État au sein des marchés obligataires.
Le point de départ : une configuration de marché extrême
Nos analyses sur le sentiment des investisseurs, la psychologie du marché et la configuration technique ont révélé des indicateurs en berne et un pessimisme généralisé en octobre. Cette configuration extrême, annonciatrice de rebond à court terme, constitue généralement un signal d'achat. Elle nous a incités à devenir plus positifs sur les actifs risqués, en renforçant nos positions sur les actions et le segment High Yield.
Plus récemment, nous observons une normalisation par rapport à cette situation extrême, mais il reste une marge d'amélioration. Par exemple, 91 % des investisseurs estiment que les bénéfices ne s'amélioreront pas au niveau mondial dans les 12 prochains mois – ce qui n'est certes pas un signe d'exubérance.
On observe que les indicateurs de sentiment et de psychologie ne sont plus extrêmes, tout en restant assez faibles dans une perspective à long terme.
Le rythme du durcissement monétaire ralentit
Alors que la phase initiale de redressement des marchés financiers semble avoir été poussée par une configuration de marché extrême, la phase suivante du mouvement ascendant avait besoin de s’appuyer sur les fondamentaux. Heureusement, la perception de la politique des banques centrales a évolué du « verre à moitié vide » au « verre à moitié plein ».
Les investisseurs ont pris bonne note de la baisse du rythme et de l'ampleur des hausses de taux adoptées par les banques centrales du monde entier par rapport aux mois précédents. Mais si l’ampleur des hausses de taux semble vouée à diminuer, les dernières déclarations des membres de la BCE sont restées agressives.
Bien entendu, les investisseurs se préoccupent essentiellement de savoir où et quand la Réserve fédérale va interrompre son cycle de resserrement. Selon nous, l'évolution du marché du travail sera déterminante. La Fed surveillera de près l’évolution de la tendance, certains indicateurs étant susceptibles d’annoncer un recul des tensions sur ce marché. Les salaires américains semblent poches d’un sommet, et leur orientation aidera à déterminer à quel niveau la Fed peut envisager une pause. Cependant, les anticipations d'inflation restent élevées.
Une baisse des primes de risque
La baisse des primes de risque associées aux perspectives économiques et politiques constitue un autre soutien fondamental pour les marchés financiers.
Si les enquêtes montrent que la contraction de l'activité manufacturière est désormais nette dans la plupart des pays, le resserrement de la politique monétaire n’est toutefois pas encore visible dans les données concrètes.
À titre d’exemple, l'indice PMI manufacturier mondial est inférieur à 50 points pour le deuxième mois consécutif, ce qui annonce une contraction. Il est intéressant de noter que le rythme de décélération s'améliore pour le deuxième mois consécutif à l'échelle mondiale, tandis qu'il progresse encore en zone euro. Cela ne constitue plus une surprise pour les investisseurs.
Les surprises liées à la croissance reviennent en territoire positif, tandis que les surprises liées à l'inflation s'estompent progressivement. En ce qui concerne l'inflation future, nous soulignons le fait que la politique monétaire implique des décalages longs et variables, ce qui devrait contribuer à faire baisser l'inflation. La masse monétaire américaine a fortement ralenti, ce qui laisse présager une modération prochaine de l'inflation.
En outre, les marchés ont anticipé une baisse de l'incertitude/de la volatilité liée aux risques géopolitiques. La volatilité de la volatilité a retrouvé ses niveaux pré-pandémie.
La baisse des primes de risque s'est également accompagnée d'une actualité rassurante en provenance de Chine, laissant espérer la fin de la stratégie « zéro Covid » en 2023.
Si la feuille de route reste floue, les préparatifs en ce sens sont en cours. En ce qui concerne les vaccins, nous notons que le vaccin inhalable de CanSino, adopté dans le sillage du Congrès du Parti communiste, pourrait être déployé prochainement. En outre, le vaccin ARNm de BioNTech a été approuvé pour les résidents étrangers.
Si la stratégie « zéro Covid » a été relancée récemment, les investisseurs espèrent une inflexion au printemps prochain, après le pic des voyages liés au Nouvel An lunaire et les deux sessions du Parti communiste de mars prochain. Alors que les marchés financiers tendent à anticiper la réouverture, la dynamique positive pourrait perdurer 2 à 3 mois, selon les observations faites en Occident.
Les révisions à la baisse des bénéfices se poursuivent
Concernant les bénéfices par action (BPA), la croissance prévue pour l'année prochaine est positive à ce stade, mais une tendance négative se dessine. Nous constatons que l'ampleur des révisions diffère selon les régions et les secteurs :
- Aux États-Unis, les révisions négatives touchent principalement le secteur de la technologie et des communications
- En Europe, les révisions négatives concernent essentiellement la consommation discrétionnaire et les matériaux
- Dans les marchés émergents, les révisions négatives se concentrent sur l'énergie et la consommation discrétionnaire
- Au sein des marchés émergents, on observe que les prévisions de bénéfices ont été fortement révisées à la baisse en Corée et à Taiwan
Comme indiqué précédemment, nous avons modélisé les prévisions de croissance des bénéfices par action pour les États-Unis et l'Europe sur la base des indices PMI mondiaux, de l'indice dollar pondéré par les échanges, du prix du pétrole et du rendement du 10 ans américain.
Cela nous a amenés à conclure que les prévisions de croissance des bénéfices ne pouvaient que baisser à l’avenir. La croissance des BPA aux États-Unis pourrait être révisée à la baisse de 2 % d'ici la fin de l'année, tandis que la croissance estimée des BPA en Europe pourrait chuter de 8 %.
Du point de vue de la performance, on observe toujours que les indices américains n’anticipent pas un simple atterrissage en douceur. Plus précisément, les valeurs cycliques de duration longue tablent sur un atterrissage brutal. En Europe, en revanche, les performances demeurent conformes aux précédents atterrissages en douceur. L’ajustement opéré le mois dernier a bénéficié aux valeurs de rendement, qui n'anticipent plus un atterrissage en douceur.
Évaluation des positions actuelles
En résumé, nous positionnons actuellement nos portefeuilles selon les trois axes suivants :
- Suivre la tendance positive des actions, mais avec un budget de risque contrôlé.
- Maintenir une légère sous-pondération de la duration.
- Rester positif sur le crédit.
Les signaux de marché ont atteint des niveaux extrêmes dans la première quinzaine d'octobre. Les actions ont depuis enregistré un rebond vigoureux, qui a entraîné une normalisation rapide et convaincante.
Les banques centrales ont atteint un point d'inflexion dans leur rythme de resserrement monétaire, ce qui augure de conditions financières plus stables, mais toujours restrictives. Compte tenu du contexte économique actuel, les attentes des investisseurs sont dès lors proches de leurs sommets.
En termes de performances, le rebond devrait être plus généralisé pour se poursuivre ; à ce stade, les principaux secteurs « value » et cycliques ont fortement progressé et commencent à être surachetés, tandis que la technologie reste à la traîne.
D'un point de vue fondamental, une reprise durable des marchés nécessitera le soutien d'une actualité plus favorable, soit sur le front géopolitique avec l'atténuation des incertitudes (conflit en Ukraine, réouverture de la Chine, élections de mi-mandat aux États-Unis), soit sur le front économique (perspective d’un plancher sur les PMI et les révisions à la baisse des BPA).