Nouvelle hausse des rendements souverains américains

Les actions mondiales ont chuté pour le troisième mois consécutif en octobre, alors que la montée des risques géopolitiques, les craintes concernant la saison des résultats et le contexte de hausse des taux ont favorisé l’or. Le mois a été marqué par une nouvelle envolée des rendements des bons du Trésor américain, impulsée par une pentification de la courbe des taux via la hausse des taux à long terme ( tendance « bear steepening »). En revanche, les investisseurs en obligations de la zone euro ont bénéficié d'une tendance « bull steepening », les taux allemands à 2 ans ayant chuté de presque 20 pb. Les taux à 10 ans ont peu varié, tandis que les échéances à très long terme (30 ans) ont enregistré de légères hausses. En dehors des États-Unis, le Japon et l'Australie se sont distingués par des taux en hausse sur l'ensemble de la courbe – il s'agit des seules grandes économies pour lesquelles les marchés prévoient encore un durcissement monétaire significatif. Les spreads de crédit se sont élargis à la fois en dollar et en euro, mais de manière plus nette pour les crédits moins bien notés.

 

Taux américains : le pic est-il en vue ?

La correction s’explique par la vigueur de l'économie américaine, illustrée par un rapport sur l'emploi très solide, des ventes de détail robustes, la bonne surprise concernant la croissance (progression du PIB de 4,9 % au troisième trimestre en rythme annualisé) et la hausse de la prime de terme. Les investisseurs ont exigé une rémunération plus élevée pour compenser les inquiétudes liées à l'inflation ainsi qu’à l'offre. Ces inquiétudes ont reflué la semaine dernière grâce au recul des chiffres de l’inflation et à une actualité encourageante sur le front des émissions, le Trésor ayant choisi de concentrer ses besoins de financement additionnels sur la partie courte de la courbe. En outre, le seuil psychologique des 5 % a jusqu’à présent agi comme une sorte de résistance.

Dans une perspective à moyen terme, le niveau actuel des rendements souverains américains nous semble attrayant. Nous sommes convaincus que la politique monétaire – après le cycle de resserrement le plus agressif en une génération – n'a pas encore produit tous ses effets et que la désinflation se poursuivra dans les mois à venir. En ce qui concerne la courbe des taux, les tendances « bull steepening » se sont fait sentir après le dernier tour de vis de la Fed dans la majorité des cycles. Le cycle en cours ne devrait pas faire exception : nous observons une forte pentification (surperformance des échéances courtes) depuis la dernière hausse des taux (à ce jour) et cette tendance est susceptible de persister. À court terme, la récente sous-performance des échéances longues incite à la prudence, car elle pourrait en partie s’inverser.

Cependant, nous notons qu’un rallye plus soutenu semble difficilement envisageable sans reflux sensible de la volatilité.

 

Taux européens : prudence accrue sur les marchés périphériques

Nous demeurons confiants dans les marchés obligataires de référence de la zone euro, toujours surpondérés. Selon notre modèle de juste valeur, les prix de l'énergie et le taux de dépôt actuel de la BCE – peu susceptible d'être relevé à nouveau – permettent d’envisager une nouvelle baisse des taux. La BCE n’a guère infléchi son discours lors de sa dernière réunion, si ce n'est pour s’inquiéter d’une économie en perte de vitesse. La décélération de l'inflation est confirmée et cette tendance devrait se prolonger. Néanmoins, l’offre se détériore à court terme, avec des émissions nettes sensiblement plus élevées que prévu – potentiellement contrebalancées par un appétit accru des investisseurs aux niveaux actuels et à ce stade du cycle.

Alors que le spread entre les BTP et les Bunds a récemment diminué jusqu’à 190 pb, nous privilégions la prudence sur les taux italiens. Nous identifions un certain risque de notation, apparent dans le changement de perspective adopté par Fitch. Pour 2024, l'incertitude entourant les réinvestissements du PEPP pourrait également exercer une pression à la hausse sur les taux italiens – sachant que l’ampleur des émissions nettes est défavorable. Les ajustements budgétaires du gouvernement italien, combinés à la détérioration de la dynamique économique, compliquent encore le tableau.

 

Taux australiens : vers un aplatissement de la courbe

Malgré la récente déroute des taux longs, nous restons positionnés pour une pentification sur la plupart des marchés. En Australie, cependant, la courbe des taux est d’ores et déjà très pentue. Si la Banque centrale a récemment relevé ses taux directeurs, les taux réels demeurent clairement négatifs. La RBA ayant déclaré qu’elle ne tolérerait pas une envolée des prix, la persistance d’une inflation, d'une croissance et d'un marché immobilier relativement robustes pourrait susciter une hausse des taux directeurs susceptible d’entraîner un aplatissement de la courbe des taux.

 

Marchés émergents : seuls certains marchés recèlent de la valeur

Compte tenu du ralentissement de la croissance et de l'inflation, mais aussi du fait que les banques centrales commencent à abaisser leurs taux, nous continuons à préférer les devises locales au crédit en devises fortes. Nous ciblons ainsi la dette à court et moyen terme de l'Inde et de l'Indonésie. Ce choix est justifié par un portage attrayant, les deux pays offrant respectivement des rendements supérieurs à 7 % et 6,5 %.

Les spreads de la dette émergente en devises fortes restent très étroits. Certains émetteurs d'Europe centrale font toutefois figure d’exception : la dette roumaine en euro offre une valeur appréciable et nous avons récemment participé à une émission attrayante en Bulgarie.

 

Faiblesse structurelle du dollar US

Historiquement, une pentification haussière du segment US 2 ans/10 ans constitue le scénario le plus défavorable au dollar. Or, nous estimons qu’il s’agit du scénario le plus probable. Un aplatissement haussier menacerait également le billet vert. Étant donné qu’un durcissement monétaire surprise semble désormais de moins en moins probable, il peut s’avérer opportun d’initier une position (encore) à contre-courant, alors que les positions longues sur le dollar se sont accumulées au cours des derniers mois.

Il est vrai que les indicateurs de valorisation sont généralement de mauvais prédicteurs à court terme de la performance des devises, mais la surévaluation du dollar en termes de PPA soutient notre vision de long terme. Il s’agit donc de mettre en place une position structurelle à long terme. Actuellement, nous vendons le dollar contre l’euro et le yen ; la BoJ semble sur le point d’entamer progressivement sa normalisation, tandis que le dollar recule par rapport à l'euro dans le sillage des déclarations du FOMC et d’indicateurs économiques moins solides.

 

Approche plus optimiste vis-à-vis du crédit

Nous sommes plus optimistes sur les segments investment grade en euro et en dollar, ainsi que sur le crédit high yield en euro, mais restons très prudents sur le crédit high yield en dollar. Dans un scénario d' « atterrissage en douceur » associé à une hausse des rendements et une stabilisation de la volatilité, le crédit investment grade devrait se redresser. La classe d’actifs reste soutenue par des valorisations attrayantes, des spreads légèrement supérieurs à leur moyenne sur 5 ans, des rendements attrayants, une bonne qualité de crédit et des facteurs techniques favorables (offre moins importante dans les semaines à venir et demande de portage accrue de la part des investisseurs). Nous avons une préférence pour les banques de détail européennes, qui offrent en moyenne 30 pb de plus que les émetteurs non financiers.

Notre changement d'opinion par rapport au segment high yield en euro s'explique notamment par une modification de la taille de la classe d'actifs. Nous privilégions désormais les émetteurs notés BB. De nombreuses étoiles montantes (23 depuis le début de l’année) sont sur le point de quitter le segment pour intégrer les indices investment grade. L'exercice des options d'achat et la faiblesse de l'offre ont limité l’ampleur de la classe d'actifs et réduit sa duration moyenne. Parallèlement, le relèvement de la note de Ford a représenté un facteur technique positif majeur. Cet environnement favorable devrait se maintenir, notamment dans les segments de qualité supérieure.

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