Une économie en panne, mais un marché qui fonctionne

Alternative Investment

La réouverture progressive des économies dans le monde entier, associée à une forte couverture médiatique sur la maîtrise relative de la propagation du virus en Europe et en Asie, ainsi que les progrès réalisés dans le développement de vaccins, ont permis au marché de rester opérationnel. Si nous semblons être encore loin d'un retour à la « normale », les marchés continuent d’afficher solidité et dynamisme. La prudence est toutefois de mise.

Les marchés des actions ont fait preuve de vigueur en juin, les actifs plus risqués affichant une surperformance. La Turquie, le Brésil, l'Afrique du Sud et l'Inde ont figuré parmi les marchés les plus performants, avec des rendements à un chiffre élevés. Les actions des marchés développés ont évolué en territoire positif, les actions européennes surperformant les grands indices boursiers américains. Le Nasdaq continue de se démarquer positivement, sous l’effet de la croissance de l'économie numérique. Au niveau sectoriel, les valeurs cycliques ont bénéficié d'une rotation du marché en faveur des valeurs financières et industrielles.

Les rendements des emprunts d’État des marchés développés restent stables et bloqués à leur niveau le plus bas. L'environnement marqué par l’appétit pour le risque a principalement favorisé une compression des spreads sur les marchés émergents et profité aux titres plus risqués en Europe.

L’indice HFRX Global Hedge Fund EUR a gagné +1,44 % sur le mois.

 

Stragégie Long short equity

Dans l'ensemble, les fonds Long Short Equity ont bien performé en juin, leurs performances étant principalement portées par les positions longues et l’exposition aux valeurs technologiques et aux stratégies thématiques. Entre la fin mai et début juin, le mouvement de rotation très important en dehors des valeurs de croissance/momentum et en faveur des valeurs décotées a nui aux performances des fonds spéculatifs, car ces stratégies ont davantage de positions longues sur les valeurs de croissance et de positions courtes sur les valeurs décotées. La rotation des facteurs s'est ralentie à partir du milieu du mois, entraînant un rebond des valeurs technologiques et des positions longues détenues par les fonds spéculatifs très prisés des investisseurs. D’après Morgan Stanley, l'inversion de la dynamique observée au cours des deux premières semaines de juin a représenté un mouvement de l’ordre de 6 écarts types, soit le niveau le plus élevé enregistré depuis 2000. Malgré cela, l'exposition des stratégies des fonds spéculatifs aux secteurs à plus forte croissance tels que la technologie reste relativement inchangée. Les stratégies les moins performantes ont principalement concerné les fonds neutres au marché, en particulier ceux qui se concentrent sur les marchés émergents et les secteurs cycliques, tels que l'énergie. L'environnement favorable au risque a été préjudiciable aux performances, en raison du fort rebond des positions courtes. Les mesures de relance massives de l’économie pourraient créer des situations délicates pour les opérations de vente à découvert. Néanmoins, les stratégies Long/Short Equity sont apparues comme faisant partie des stratégies gagnantes et parmi les plus performantes depuis le début de la crise du Covid-19. La liquidité des actifs sous-jacents et la modularité de l’exposition nette ont permis de diminuer l’exposition au risque au début de la pandémie, de générer de l'alpha à partir des positions courtes et de déplacer progressivement les capitaux vers des entreprises et des thèmes capables de profiter de la crise. Les stratégies Long Short Equity sont, à notre avis, intéressantes pour tirer son épingle du jeu dans les conditions actuelles de marché, car elles peuvent moduler leur appétit pour le risque et générer des rendements à partir de leurs positions longues et courtes sur un très large éventail de thèmes d'investissement. Les gérants aguerris en matière de sélection de valeurs seront en mesure de choisir les gagnants et les perdants.

 

Stratégies Global Macro

Les performances ont été relativement disparates pour les fonds Global Macro. Les stratégies discrétionnaires ont généralement surperformé les fonds à gestion systématique. Les gestionnaires discrétionnaires ont été capables de titrer parti de positions directionnelles sélectives. Les fonds les plus performants ont été ceux qui ont pris des positions longues sur les actions et des positions longues sur des émissions souveraines sur les marchés émergents. Les stratégies systématiques, qui tendent à être plus diversifiées par nature et qui s'appuient sur des données observables, ont plus de mal à faire face aux rumeurs du marché. Les positions gagnantes sur les actions et les obligations ont eu tendance à être neutralisées par des pertes sur le change et les matières premières. Compte tenu des niveaux élevés de volatilité et de l'incertitude future, les gestionnaires de fonds réévaluent constamment leurs positions. Les programmes de relance massifs annoncés par les banques centrales et les gouvernements du monde entier devraient contribuer à stabiliser le marché. Toutefois, tant que la crise sanitaire actuelle n’aura pas été endiguée et que nous n'aurons pas appris à vivre avec, les perspectives seront plus floues. Dans ce contexte, nous avons tendance à privilégier les gestionnaires de fonds discrétionnaires opportunistes qui peuvent s'appuyer sur leurs compétences analytiques et leur expérience pour générer des profits à partir de quelques opportunités rentables dans les quatre coins du monde . La stabilisation du marché et la visibilité accrue des données macroéconomiques devraient conduire à de meilleures performances de la part des stratégies systématiques, avec des niveaux de volatilité réalisés attendus inférieurs à ceux des gestionnaires discrétionnaires plus concentrés.

 

Stratégies quantitatives

2020 n'a pas été un environnement facile pour les stratégies quantitatives. Les modèles ont eu du mal à faire face à l'augmentation brutale et rapide de la volatilité des marchés et des corrélations entre actifs observées entre fin février et avril. Les niveaux de volatilité extrêmes et persistants atteints au cours du mois de mars ont conduit ces stratégies à réduire fortement leur effet de levier, ce qui a entraîné des performances médiocre et une réduction supplémentaire de l’effet de levier. La décision d’interdire la vente à découvert dans certains pays européens a contribué à amplifier le phénomène de réduction de l'effet de levier, car les gestionnaires n'ont pas été en mesure de mettre en œuvre ou d'ajuster de manière optimale les poches longues et les poches courtes de leur portefeuille. La participation au marché des fonds quantitatifs est en augmentation mais reste encore limitée, en raison des niveaux de volatilité relativement élevés, d’après les moyennes récentes du marché. L'univers des stratégies quantitatives au sens large a connu une grande dispersion des performances. Pour les stratégies quantitatives liquides avec des modèles à plus long terme, le mois s’est avéré globalement difficile. Il n'y a pas eu de stratégie sensiblement gagnante pour compenser les contributions négatives des stratégies actions neutres au marché, ces dernières ayant été très affectées par le très net retournement de tendance.

 

Stratégies d'arbitrage de taux

Dans l’univers obligataire, les stratégies de valeur relative ont connu l'un des mois les plus spectaculaires de leur histoire en mars 2020, ce qui a mis en évidence la nécessité d'investir dans des fonds disposant de structures solides (lignes de repo à terme garanties avec des contreparties de qualité et des relations de longue date). Fin mars, nos gestionnaires ont profité des mouvements de dislocation aux États-Unis, pour afficher des rendements positifs historiques et profiter d’une opportunité unique qui ne se présente que rarement. A l’approche de l'échéance de juin, les positions de base ont été renouvelées sur l'échéance de septembre, ce qui semble assez intéressant, même si cela l’est moins qu’en mars. Comme pour les autres positions de valeur relative, les spreads se sont creusés par rapport à leur niveau d’avant la crise, et nous restons positifs vis-à-vis de cette stratégie, même si la mise en œuvre potentielle du contrôle des courbes de rendement par la Fed pourrait changer la donne en matière de volatilité des taux d'intérêt.

 

Marchés émergents

Le mois de juin a été très positif pour les stratégies de hedge funds axées sur les marchés émergents, qui ont fortement bénéficié du contexte d’appétit pour le risque. Les stratégies diversifiées et celles de valeur relative ont eu tendance à sous-performer par rapport aux fonds directionnels discrétionnaires, lesquels ont réussi à gagner pas mal d’argent sur les positions liées à leurs convictions. Les principaux moteurs de performance ont été les positions longues sur des obligations d’entreprise concernant des émissions souveraines à Porto Rico, en Afrique du Sud et en Argentine, et les taux reçus sur des émissions au Brésil et au Mexique. Les perspectives macroéconomiques restent toutefois extrêmement floues pour les marchés émergents. Les gestionnaires fondamentaux soulignent que, dans une optique de taux zéro, les marchés émergents représentent la seule alternative pour obtenir un rendement intéressant. Toutefois, compte tenu de la fragilité des fondamentaux, ils adoptent généralement une approche très sélective. Les transactions concernent principalement des prises de position sur des obligations, des obligations d’entreprises et des devises, où la tarification du risque dominée par la peur crée des dislocations et des opportunités massives en ignorant les fondamentaux spécifiques à chaque région. Le marché est cyclique et, en tant que tel, les dislocations massives actuelles sont sources d’opportunités d'investissement futures, à des points d'entrée plus intéressants. Nous restons prudents à l’égard de cette stratégie car, au-delà des considérations fondamentales, cette classe d’actifs pourrait souffrir de sorties de capitaux en quête d’'opportunités sur le segment High Yield des marchés développés et d'un manque de liquidité.

 

Risk arbitrage - Event-driven

Le mois de juin a été positif pour ces stratégies. Les stratégies liées aux situations spéciales ont surperformé, étant plus sensibles au bêta et capables d’assurer un ratio de capture à la hausse plus élevé dans des marchés directionnels forts. Les stratégies d’arbitrage de fusions ont affiché des performances, en moyenne, positives, mais en retrait par rapport à l'indice global du segment, car elles ont eu moins de chemin à rattraper. Bien que mars 2020 ait représenté un événement traumatisant pour de nombreux gestionnaires de fonds d’arbitrage de fusions, les meilleurs fonds ont récupéré les pertes qu’ils avaient subies et affichent désormais une performance positive depuis le début de l'année. L'indice global du segment enregistre une baisse située au milieu d’une fourchette à un chiffre entre le début de l’année et la fin du mois de juin. Actuellement, le nombre de transactions est tombé à son plus bas niveau depuis dix ans, ce qui n'est pas totalement surprenant, compte tenu du niveau élevé d'incertitude. Alors que les entreprises américaines sont généralement parmi celles qui génèrent le plus de transactions dans le monde, la situation aux États-Unis est particulièrement grave, puisque le nombre global d’acquisitions qui y a été enregistré en avril s’est effondré de 90 % par rapport à la même période l'année dernière, alors que le nombre global d’acquisitions dans le monde a chuté de 50 % par rapport à la même période l’année dernière. Ce type d'activité est cyclique et, à ce titre, le nombre de transactions devrait à nouveau augmenter, car la croissance du PIB reste faible (les entreprises vont se faire concurrence pour assurer leur croissance), la visibilité augmente et le financement reste largement disponible. Dans l'intervalle, il est important de rester sélectif dans le choix des opérations en raison du risque accru d'échec des opérations.

 

Entreprises en difficulté

Les opportunités relatives aux entreprises en détresse sont enfin là, mais pas sous la forme que nous avions prévue. Au lieu d'arriver progressivement en fin de cycle du crédit, l'économie mondiale plongée dans un coma artificiel a précipité de nombreuses entreprises au bord du gouffre. Dès lors, la question n'est pas de savoir s'il y aura des opportunités dans l’univers des entreprises en difficulté, mais combien il y en aura. Nous espérons que les plans d’assouplissement monétaire et de relance budgétaire mis en place seront efficaces et limiteront les dommages causés à nos économies. Pour autant, nous ne pourrons pas sauver toutes les entreprises. D’après les discussions que nous avons eues avec d’autres gérants expérimentés, il semble que le crédit soit actuellement vendu avec de fortes décotes, non seulement pour des raisons fondamentales, mais aussi par manque de liquidité. Les gestionnaires actifs sur ce segment ne se précipitent pas pour se positionner à l’achat. Ils doivent procéder à une analyse approfondie de ces actifs avant d’émettre une offre au bon prix. La plupart de ces gestionnaires ont segmenté cette dynamique de marché en trois phases. Ils ont commencé par acheter des titres de qualité Investment Grade à prix réduit, les négociant de manière active et les vendant relativement rapidement lorsque des spreads de liquidité croissants ont commencé à se resserrer. Ensuite, ils ont entamé une phase plus sélective d'achat d’« anges déchus » et de titres High Yield triés sur le volet. La troisième et dernière phase est actuellement en cours, à mesure qu’un nombre croissant d'entreprises déposent leur bilan. Selon l'Epiq, un groupe de services juridiques, le nombre de défaillance aux États-Unis est à son plus haut niveau depuis 2013. Les taux de défaillance anticipés par Moody's et S&P sont de 13,3 % et 12,5 % respectivement. Au cours des trois dernières récessions, indépendamment de leur durée et de leur niveau, les taux de défaillance ont toujours culminé à environ 10 %. Cette fois, néanmoins, l'ampleur du choc économique est bien plus importante que tout ce que nous avons connu jusqu’ici. Il est donc probable que les valeurs de nombreux actifs liés au crédit subissent encore une correction en s'ajustant à la gravité de la crise.

 

Stratégies Long short credit & High Yield

Les spreads de crédit pour les marchés Investment Grade (IG) et High Yield (HY) ont atteint des niveaux extrêmes inédits depuis la crise de 2008. Le marché a été également fortement touché par le manque de liquidité, ce qui a incité la BCE et la Fed à intensifier leurs programmes d'achat d’obligations Investment Grade. La Fed a également décidé d'inclure le High Yield dans ses programmes d'achat afin de lisser le montant élevé d’anges déchus de qualité d'Investment Grade déclassés en High Yield. Les agences de notation estiment que le montant de la dette liée aux anges déchus pourrait atteindre 700 milliards de dollars aux États-Unis, un montant probablement trop important pour être absorbé en douceur par le marché HY. Les spreads des émissions Investment Grade et High Yield à court terme ont réagi très rapidement aux injections de liquidités, en particulier aux États-Unis. D’après les gestionnaires que nous suivons, si cette rotation vers des titres de meilleure qualité était largement attendue, il existe encore de nombreuses opportunités non seulement sur le segment High Yield mais également sur le segment des stratégies multi-actifs de valeur relative (long bond vs. short equity) et celui des stratégies intra-actifs (long bond et long protection) générées par les dislocations du marché. Contrairement au quatrième trimestre 2018, les arbitrages entre les différentes opportunités sur le marché du crédit prendront du temps, laissant ainsi aux investisseurs tout le loisir de revoir leurs allocations.

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