« Start me up ! »

À l’instar des Rolling Stones lors de leurs concerts, la position accommodante de la Fed a eu pour effet de « verser de l’essence »[1] sur un marché déjà passablement enflammé. Il y a quelques semaines, Jerome Powell dessinait pourtant la perspective de taux durablement plus élevés face à un marché en pleine effervescence. Bien que le marché ait basculé très rapidement dans l’optimisme en tablant sur un environnement plus favorable grâce à des baisses de taux, les investisseurs demeurent divisés en matière de prévisions pour 2024.

Les marchés boursiers ont poursuivi leur progression en décembre, affichant des performances mensuelles comprises entre 5 et 9 %. Ce sont les biotechnologies et les petites et moyennes entreprises américaines qui ont le plus profité des anticipations d’assouplissement monétaire. Malgré des perspectives économiques moins brillantes, les actions européennes ont suivi le mouvement. Au niveau sectoriel, les valeurs cycliques ont surperformé.

Les prévisions d’inflation en baisse ont eu un impact particulièrement important sur les rendements souverains américains et britanniques. Les rendements à moyen et long terme ont baissé de 60 à 100 pb aux États-Unis au cours des deux derniers mois, tandis que le rendement du Gilt à 5 ans a perdu 50 pb.

L’indice HFRX Global Hedge Fund EUR a enregistré une performance de 1,2 % sur le mois.

 

Stratégies Long/Short Equity

Portés par le rallye boursier de fin d’année, les fonds Long/Short Equity ont enregistré globalement des performances positives au cours du mois. Cependant, la génération d'alpha sur les positions short a été négative, principalement en raison de mouvements de couverture. Depuis le début de l’année dernière, les fonds de ce segment ont dégagé une performance moyenne proche de 5 %, mais les résultats ont été irréguliers tout au long de la période. Au cours du premier semestre, la performance a essentiellement reposé sur un nombre très limité de thèmes et une poignée de titres. La situation s'est améliorée au cours des deux derniers trimestres, mais cela s’est traduit par un ratio de capture de la hausse des indices de référence inférieur à la moyenne pour les gérants Long/Short Equity. Selon les données de Morgan Stanley Prime Brokerage, les fonds Long/Short Equity internationaux ont capturé en moyenne 36 % de la performance des indices actions. D'un point de vue régional, les ratios annuels de performance relative ont été similaires pour les fonds investissant aux États-Unis, en Europe ou en Asie. En termes absolus, les stratégies axées sur les États-Unis ont surperformé leurs homologues d’Europe et d’Asie. Grâce à un bêta favorable et à une sélection de titres efficace, les fonds Long/Short Equity ont terminé l'année parmi les stratégies les plus performantes. Maintenant que le cycle de hausse des taux touche à sa fin, nous anticipons une plus grande dispersion entre les secteurs et au sein de ceux-ci, ce qui sera bénéfique pour le segment. En outre, par rapport aux stratégies traditionnelles « long only », ces stratégies résisteront mieux à une hausse éventuelle de la volatilité si le scénario dominant d'une croissance modérée pour 2024 devait être remis en cause.

 

Stratégies Global Macro

Les performances moyennes des stratégies Global Macro ont été positives pendant le mois, mais modestes. Bien que les mouvements de marché sur les taux d'intérêt et les actions aient été significatifs, de nombreux gérants ont conservé une exposition au risque inférieure à la moyenne en raison de niveaux d'incertitude très élevés. En outre, ils ont eu tendance à privilégier les stratégies de valeur relative plutôt que les paris directionnels. Les gérants plus confiants dans les perspectives économiques ont obtenu les meilleurs résultats, via des positions longues sur les actions et les obligations. Sur l'ensemble de l'année, les performances ont été relativement dispersées en fonction de l'appétit pour le risque du gérant et de son optimisme vis-à-vis du reflux de l'inflation. Relativement faibles depuis le début de l’année, les performances générées par ces stratégies se sont globalement avérées décevantes. Toutefois, l'environnement actuel et les perspectives à court terme devraient offrir des opportunités d'investissement intéressantes.

 

Stratégies quantitatives

Les stratégies de suivi de tendance ont, en moyenne, bien performé au cours du mois, grâce aux contributions positives de leurs modèles à court et moyen terme. Les positions longues en actions et obligations ont été les principaux détracteurs de la performance. Pénalisées par la hausse des titres de moindre qualité, sur lesquels elles ont souvent des positions short, les stratégies d'arbitrage statistique ont également perdu de l'argent. Les performances des fonds quantitatifs multi-stratégies ont été dispersées. Depuis le début de l’année, ces fonds ont cependant mieux résisté que les CTA, compensant les contributions négatives des modèles de tendance par les bons résultats des modèles d’arbitrage non directionnel.

 

Stratégies d’arbitrage obligataire

2023 restera une année mémorable pour le marché obligataire, au cours de laquelle tout est allé très vite. De janvier à la mi-octobre – sauf pendant la mini-crise provoquée par la SVB en mars –, les banques centrales du monde entier ont relevé leurs taux directeurs à l'un des rythmes les plus rapides de l'histoire. Ce mouvement, qui a mis fin à une ère exceptionnelle de taux zéro, a déclenché des ajustements dans l’ensemble du marché obligataire. Lorsque les bons du Trésor américain à 10 ans ont atteint la barre des 5 %, l'ensemble du marché obligataire a connu un retournement d’une violence inédite. Alors que les flux de transactions s’inversaient complètement, les stratégies combinant l'arbitrage de prix pur avec des positions fondamentales de valeur relative ont réussi à exploiter la volatilité des marchés. Dans le même temps, les gérants directionnels ont su gérer le retournement, en prenant des bénéfices et en réduisant considérablement la voilure. Alors que se profile une nouvelle période de taux potentiellement plus bas – une perspective difficilement imaginable il y a seulement deux mois –, les stratégies d’arbitrage obligataire devraient bénéficier d’une volatilité accrue.

 

Stratégies Risk Arbitrage – Event Driven

Le mois s’est avéré excellent pour les gérants Event Driven. En moyenne, l’ensemble des sous-stratégies ont contribué positivement à la performance. L'arbitrage de fusions a bénéficié de l'acquisition réussie de Seagen par Pfizer et des anticipations de fin du cycle de hausse des taux, qui devrait doper le volume de transactions annoncées en 2024. Les stratégies de situations spéciales en actions et en crédit ont bénéficié du retour de l’appétit pour le risque, car ces stratégies ont une exposition nette plus longue et détiennent des titres de moindre qualité, généralement favorisés par cet environnement. Les annonces de fusions ont été relativement limitées au cours des deux dernières années, ce qui est compréhensible au vu de la volatilité des marchés. Selon les spécialistes, le nombre de transactions annoncées est davantage corrélé au niveau de visibilité qu'ont les dirigeants d'entreprise sur l'état et l'orientation de l'économie qu'au niveau du coût de la dette lui-même. Comme l'inflation diminue lentement et que les taux d'intérêt se rapprochent de leur pic, nous pourrions être au début d'un cycle favorable à la stratégie.

 

Stratégies Distressed

Au cours des 18 derniers mois, le paysage des opportunités d'investissement a considérablement. évolué sur ce segment À la fin 2022, la forte poussée inflationniste et la succession rapide des hausses de taux semblaient annoncer, pour les stratégies Distressed, une ère de prospérité inédite depuis la Grande crise financière. Ces attentes ont faibli en 2023, dans un contexte où l'économie et le marché de l'emploi se sont avérés plutôt résilients. Les opportunités qui se sont présentées au cours de l'année ont dès lors été liées à des événements spécifiques tels que la crise bancaire aux États-Unis (premier trimestre 2023), ou à des situations idiosyncratiques. Actuellement, les taux de défaut ont commencé à augmenter, mais de manière limitée car la plupart des entreprises ont refinancé leur dette de manière opportuniste en bloquant de faibles taux d’emprunt au cours de la période 2020-2021, tandis que la santé financière des consommateurs demeure relativement solide. Prudents en matière d’investissement dans les émetteurs à haut rendement, les gérants Distressed se montrent attentistes et préfèrent se concentrer sur des opportunités idiosyncratiques, d’autant plus qu’ils ont identifié certaines failles dans des domaines tels que le marché des prêts. De fait, certains acteurs se sont lourdement endettés par le biais de prêts à taux variable, sans anticiper une hausse aussi fulgurante des taux à court terme. 

 

Stratégies Long/Short Credit 

Les stratégies Long/Short Credit semblent retrouver une partie de leur attrait. Alors que la recherche fondamentale devient plus importante dans la construction de portefeuille, un environnement de taux durablement plus élevés pourrait favoriser la génération d’alpha à la fois sur les positions longues et short. Par ailleurs, les approches de performance absolue ou incluant des positions de couverture ont gagné en pertinence, car les positions sur les émissions AT1 ont généré une volatilité importante et des pertes très significatives. De plus, la hausse incontestable des rendements a redonné une place de choix aux obligations dans l’allocation d'actifs. Au vu des événements récents, la diversification des risques demeure néanmoins essentielle et devrait faire partie intégrante du processus d'allocation des investissements.

 

[1] « Start me up », chanson des Rolling Stones.
[2] Extrait de la chanson des Rolling Stones intitulée « Start me up ».

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