Un sentiment de soulagement

Le début de l'année a apporté un certain soulagement aux investisseurs, qui ont effacé une partie des pertes subies l'année dernière. Actions et obligations sont néanmoins restées étroitement corrélées, tant les taux, le crédit que les actions affichant des performances positives. Au sein des obligations, les marchés risqués ont surperformé, emmenés par le high yield américain, suivi de près par son homologue européen et par la dette émergente en devise forte. Parmi les principaux marchés de taux, les obligations des antipodes (Australie et Nouvelle-Zélande) ont dégagé les meilleurs rendements, suivis par les Gilts et les émissions des autres pays européens hors zone euro. Les obligations d'État japonaises (JGB) et les bons du Trésor américain ont fermé la marche.

Les marchés de crédit ont suscité un vif appétit des investisseurs, les émissions juniors et subordonnées surperformant les autres segments. Parallèlement, les émetteurs les moins bien notés ont enregistré les meilleures performances. L'appétit pour le risque était visible dans de nombreux secteurs. Les secteurs défensifs comme la consommation, le commerce de détail et la santé sont toutefois restés en queue de peloton. En revanche, l'immobilier a conservé une longueur d’avance, grâce aux anticipations d’une inflexion de la politique des banques centrales et à l’apaisement des inquiétudes concernant les conditions de financement.

 

Christine Lagarde – le dernier faucon en activité ?

Nous réduisons la sous-pondération des échéances courtes de la courbe des taux en euro, car la baisse tendancielle de l'inflation globale devrait se répercuter sur la politique monétaire. Si Christine Lagarde a adopté un ton relativement agressif en promettant une nouvelle hausse de 50 points de base en mars, elle n'a pas pris d'engagement quant à la trajectoire future des taux directeurs. Les prévisions d'inflation de la BCE, présentées lors de sa prochaine réunion, seront scrutées attentivement par les investisseurs. Après une longue période de sous-estimation de l'inflation, les projections des services de la banque centrale devront être abaissées lors de la réunion de mars. Si le recul des prix de l'énergie permet d’anticiper une convergence de l'inflation globale et de l'inflation sous-jacente, les statuts de la banque centrale stipulent que la politique monétaire doit être guidée par l’inflation globale (prix de l'énergie inclus).

En ce qui concerne les taux « non core », le gouvernement Meloni semble désireux de garder le contact avec ses partenaires européens en les assurant de son sérieux. Cependant, l'arrêt progressif du programme d'achat d'actifs risque d'exercer une pression à la hausse sur les rendements italiens et incite à la prudence.

Du côté de l’offre, la situation se dégrade en 2023, car les réinvestissements du PAA européen seront progressivement réduits — de 15 milliards d’euros par mois à partir de mars — alors que le déficit budgétaire doit être financé. Nous conservons une position de pentification sur le segment 10 ans/30 ans de la courbe des taux en euro.

Enfin, il convient de noter que l'Union monétaire européenne a accueilli son 20e État membre, la Croatie, en début d’année – le pays n’appartient pas, à ce stade, aux indices de référence des marchés développés. Compte tenu d’une offre limitée, les effets techniques de l'inclusion dans certains indices devraient apporter un soutien à cet émetteur lors des prochains rééquilibrages.

 

Quand aura lieu « l'atterrissage » – a priori « en douceur » ?

Quel est le point commun entre le Boeing 747 et le chômage américain ? Le « jumbo jet » a fait ses débuts en 1969 — une année où 7 Américains sur 10 vivant aujourd'hui n'étaient pas nés — et le dernier appareil de la série a été livré cette année. 1969 est également la dernière année (avant 2023) où le taux de chômage américain est passé sous la barre des 3,5 %.

Jusqu'à présent, le marché du travail a fait preuve d’une remarquable indifférence aux hausses des taux de la Fed. Pourtant, la rapidité du resserrement monétaire opéré en 2022 est sans précédent dans l’histoire récente. Cela laisse planer une certaine dose d'incertitude quant à la durée et à l'ampleur du décalage associé aux répercussions de la politique monétaire. Il y a encore moins d'un an, les taux directeurs étaient à peine supérieurs à 0 %. En cas de hausse supplémentaire de 75 points de base au premier semestre, les taux de la Fed s’établiront à 5,25 %, soit le niveau atteint en 2008 après un cycle de resserrement de deux ans. Dans ce contexte, les investisseurs ne doivent pas ignorer le risque d'un essoufflement notable de l’économie américaine. Nos analyses indiquent en effet une probabilité croissante de ralentissement du cycle économique. Si la plupart des indicateurs restent orientés à la hausse, les taux de variation ont clairement diminué. Le marché du travail fait figure d’exception et constitue une source de préoccupation non seulement pour les acteurs du marché, mais aussi pour les membres du FOMC eux-mêmes.

Néanmoins, les investisseurs obligataires peuvent être rassurés par l’évolution de l’inflation, incontestablement en phase de reflux durable. Les déclarations du président de la Fed, Jerome Powell, ont été plus pessimistes qu’anticipé ; contrairement à Christine Lagarde, il n'a pas ouvertement contesté l’ampleur des futures hausses de taux intégrées dans les prix de marché. Dans ce contexte, tout accès de faiblesse offrirait un bon point d'entrée pour acheter de la duration américaine.

 

Opportunités dans les autres courbes dollar et les marchés émergents

Par rapport aux autres pays développés, l’Australie est restée à l’abri des phases de ralentissement durant de longues décennies ; mais cela pourrait prendre fin. Pour cette année, la croissance économique est loin d’être assurée malgré la réouverture de la Chine. Tant en Australie qu'en Nouvelle-Zélande, les indicateurs actuels et prospectifs sont plutôt négatifs. Au vu des marchés immobiliers de ces deux pays, de leur forte sensibilité aux taux d'intérêt et d’un objectif d'inflation plus souple (une fourchette allant jusqu'à 3 %), nous continuons d’anticiper un reflux des taux directeurs.

Nous sommes toutefois d’un avis contraire sur le Canada, même si les marchés anticipent d’importantes baisses de taux dans un contexte où la Banque du Canada est temporairement moins accommodante à la lumière d'une économie solide.

Les valorisations de la dette émergente en devise forte restent élevées. En ce qui concerne les obligations souveraines en devise forte, les spreads se situent à des niveaux historiquement bas. Certains marchés en devise locale sont toutefois intéressants. En ce qui concerne les taux, le Brésil reste très attrayant avec des rendements nominaux de 13 % et une inflation inférieure à la plupart des marchés développés. Sur le marché des changes, la réouverture de la Chine devrait soutenir le réal brésilien, le won coréen et le peso mexicain.

 

Après de solides performances pour le segment Investment Grade européen, le contexte technique devrait rester favorable

Malgré de solides performances, nous restons positifs sur le crédit investment grade européen, car le portage demeure intéressant. La classe d'actifs a fortement progressé malgré des marchés primaires très actifs : près d'un quart des émissions prévues pour 2023 ont été mises sur le marché au cours du seul mois de janvier. Nous tablons dès lors sur une certaine modération dans les prochaines semaines, alors que la période de « blackout » approche pour les entreprises européennes. En termes de fondamentaux, la conjugaison des contextes macroéconomique et microéconomique crée des conditions quasi idéales : le risque de récession s'estompe, l'inflation s'atténue et les conditions de financement ne devraient pas se resserrer de manière significative. Si les bénéfices décélèrent, la contraction est moins prononcée qu’on ne pouvait le redouter. La saison de publication des résultats a également reflété un bon début d'année pour les banques de la zone euro.

En ce qui concerne le crédit américain, le rally de janvier tempère notre positionnement haussier. Nous préférons les actifs risqués en euro. La prime de risque du high yield en dollar est clairement moins attrayante. Compte tenu de la qualité des fondamentaux, le high yield américain semble cher – les spreads sont inférieurs à 400 pb.

Si nous pensons que 2023 offrira de réelles opportunités d'investissement sur le marché du crédit, nous sommes convaincus que la dispersion augmentera. La santé financière, la performance opérationnelle et la génération de flux de trésorerie sont des facteurs clés dans le choix des émetteurs. La prise en compte des ambitions climatiques est également devenue incontournable.

Strategie et positionnement

Ralentissement, mais la récession sera évitée

Europe

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Les prix de l'énergie ont chuté et les stocks de gaz sont à des niveaux élevés. Les mesures budgétaires, la croissance solide de l'emploi et l'important excédent d'épargne soutiennent l'économie, qui s’avère plus résistante que prévu.

Si la BCE reste agressive à court terme, avec une hausse de 50 pb lors de sa réunion de mars, les hausses de taux ultérieures dépendront des données. Les nouvelles prévisions macroéconomiques publiées par la banque centrale en mars fourniront des indications précieuses. Après des mois de hausse continue, les perspectives d’inflation à court terme sont plus mitigées et doivent être surveillées. Nous réduisons notre sous-pondération de l’échéance à 2 ans.

Du côté de l’offre, la situation se dégrade en 2023, car les réinvestissements du PAA européen seront progressivement réduits — de 15 milliards d’euros par mois à partir de mars — alors que les déficits budgétaires doivent être financés. Nous conservons une position de pentification sur le segment 10 ans/30 ans de la courbe des taux en euro.

Les obligations autrichiennes restent attrayantes par rapport à leurs homologues françaises. Compte tenu des valorisations actuelles, de la solvabilité et des profils ESG des deux pays, le ratio offre/déficit semble plus problématique pour la France.

Parmi les pays périphériques, nous préférons le Portugal à l'Italie. Nous surveillons l'évolution budgétaire en Italie.

Nous maintenons une opinion positive sur le crédit investment grade en euro. Malgré l'impressionnante remontée des spreads, les marchés européens du crédit continuent d'offrir un portage intéressant de 3,75 %. La désinflation est en cours et le risque de récession s'éloigne. Les bénéfices ralentissent, mais sont plus résistants que prévu. Les facteurs techniques demeurent favorables, car l’offre diminuera en février. Nous restons très sélectifs dans un environnement toujours difficile. Nous préférons le high yield en euro par rapport à son homologue en dollar. Même après le rally, le portage en euro est plus élevé sur une base ajustée du change, tandis que la qualité du crédit est meilleure.

Nous restons neutres sur les convertibles en euro suite au rally des marchés actions et attendons un meilleur point d'entrée.

 

 

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La désinflation est en cours aux États-Unis

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Le ralentissement actuel de l'économie américaine est visible, les indicateurs du secteur manufacturier et l’investissement résidentiel étant orientés à la baisse, mais la consommation et le marché du travail continuent de résister.

La désinflation est en cours après le resserrement monétaire sans précédent de la Fed, et la hausse des taux devrait prendre fin au premier semestre. Nous restons neutres sur la duration américaine, mais tout rebond des taux pourrait être une opportunité d'acheter de la duration.

Nous continuons de privilégier les obligations australiennes par rapport aux bons du Trésor américain, en particulier sur les échéances longues, car elles offrent le meilleur portage en dehors du Japon. En Nouvelle-Zélande, le marché commence à intégrer la faiblesse de la croissance intérieure, et nous maintenons nos positions longues. En revanche, le Canada semble plutôt cher ; le portage est négatif et la plupart des baisses de taux à venir sont déjà dans les cours. Nous recommandons une position short sur le Canada.

Nous continuons de privilégier les obligations australiennes par rapport aux bons du Trésor américain, en particulier sur les échéances longues, car elles offrent le meilleur portage en dehors du Japon. En Nouvelle-Zélande, le marché commence à intégrer la faiblesse de la croissance intérieure, et nous maintenons nos positions longues. En revanche, le Canada semble plutôt cher ; le portage est négatif et la plupart des baisses de taux à venir sont déjà dans les cours. Nous recommandons une position short sur le Canada.

Nous avons réduit notre surpondération du segment IG en dollaraprès un rally particulièrement vigoureux et préférons les actifs risqués en euro. La prime de risque du high yield américain est également moins attrayante. Nous prenons des bénéfices après le rally impressionnant observé en janvier. Compte tenu de la qualité des fondamentaux, les obligations à haut rendement en dollar semblent chères – les spreads sont inférieurs à 400 pb.

Réouverture de la Chine

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Nous maintenons une sous-pondération des obligations japonaises, car le segment du 10 ans est menacé par un éventuel changement de politique monétaire, alors qu'un nouveau gouverneur est sur le point d’être nommé et que l'inflation dépasse largement son niveau cible.

La Chine rouvre son économie et les indicateurs de mobilité indiquent un fort rebond. Les valorisations des obligations chinoises sont chères.

 

Dette des pays émergents

Fi_figure5FR.pngPréférence pour la dette émergente en devise locale
Le contexte s'est amélioré pour les marchés émergents avec le ralentissement de la croissance et de l’inflation aux États-Unis, ainsi que la réouverture de la Chine. Les valorisations des obligations en devise forte sont tendues, notamment pour les émetteurs souverains Investment Grade. Les taux locaux et les devises émergentes offrent les meilleures perspectives, car l'inflation atteint un pic et les grandes banques centrales mettent fin à leur cycle de resserrement monétaire.

 

 

 

Approche de valeur relative sur les devises

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Le dollar a atteint un pic en 2022


En termes de fondamentaux, la parité AUD/NZD devrait être plus élevée étant donné la vigueur des prix des principales matières premières exportées par l'Australie. La réouverture de la Chine pourrait légèrement favoriser le dollar australien.
Nous avons pris quelques bénéfices sur notre position short sur la livre sterling.

Modeste position longue sur le franc suisse. Protection en cas de retour de l’aversion au risque.

 

Nous achetons des devises émergentes contre le dollar, car la Fed est moins agressive, ce qui favoriserait les transactions de portage dans un scénario d'atterrissage en douceur.

Modeste position longue sur le won coréen.

Modeste position longue sur le peso mexicain. Nous prenons des profits, mais pourrions renforcer la position à un meilleur niveau.

Le réal brésilien devrait bénéficier de la réouverture de la Chine.

 

Légende :
- Allocation tactique : classement à 5 niveaux allant de 2 (très positif) à -2 (très négatif)
- Changements par rapport au mois précédent

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